Dans les atmosphères planétaires, des structures d’écoulement de grande taille peuvent se former à partir de petits courants turbulents. C’est ce que démontrent les études menées par des chercheurs du Laboratoire de Mécanique des Fluides et d’Acoustiques (LMFA) et de l’équipe “Physique Non-Linéaire” du LPENS, qui mettent en évidence l’existence de transferts d’énergie des petites échelles vers les grandes dans les fluides turbulents naturels, grâce à l’appui de simulations numériques. Ces résultats sont publiés dans la revue Science.

L’atmosphère terrestre ou d’autres planètes présentent des structures d’écoulement qui s’étendent sur plusieurs milliers de kilomètres. Ces structures peuvent résulter de mouvements globaux de l’atmosphère, mais aussi de petits courants turbulents qui s’auto-organisent à grande échelle. Ce dernier processus, appelé ”cascade inverse”, suppose des transferts d’énergie des petites échelles vers les grandes, à l’inverse de ce que chacun peut quotidiennement observer en versant du lait dans son café : une turbulence qui donne naissance à des structures de petites tailles.

Pour démontrer la possibilité d’un phénomène de cascade inverse dans une atmosphère planétaire, il fallait pouvoir simuler avec précision un domaine atmosphérique suffisamment grand. En cumulant 40 millions d’heures de calcul sur le supercalculateur Joliot-Curie du CEA, les chercheurs ont pu réaliser des simulations numériques directes des écoulements dans une atmosphère de 15 km de hauteur et environ 500 km de large, avec une résolution horizontale et verticale de seulement quelques dizaines de mètres. Cette étude a été rendue possible par la puissance de calcul disponible sur le supercalculateur de dernière génération du CEA, mais aussi par des années d’exploration préalable des différents paramètres physiques, réalisées au LMFA, au LPENS et à l’Université de Buenos Aires (UBA), qui ont abouti à un modèle de simulation optimisé, basé sur la caractérisation des phénomènes de la mécanique fondamentale des fluides qui régissent la dynamique des écoulements géophysiques.

La simulation réalisée décrit les transferts d’énergie entre les différentes échelles d’écoulement : les résultats obtenus sont conformes à ceux des campagnes de mesures in situ réalisées par de véritables avions, et ont permis d’obtenir pour la première fois des informations sur la façon dont l’énergie cinétique se répartit entre les différentes échelles dans l’atmosphère, qui ne peuvent actuellement être déduites des observations.

Visualisation des fluctuations de densité et du champ de vitesse. Les structures à des échelles beaucoup plus grandes que l’épaisseur de la couche sont abondantes dans le plan horizontal visible (à gauche), ce qui indique une cascade inverse de l’énergie vers les grandes échelles horizontales. En même temps, des modes d’instabilité 3D vers les petites échelles sont détectables dans les coupes horizontales et verticales du domaine de simulation agrandi (en bas à droite), ce qui suggère l’action d’une cascade turbulente vers l’avant.

 

 

En savoir plus :
https://doi.org/10.1126/science.adg8269 et https://www.insis.cnrs.fr/fr/cbox/ontheweb

Informations complémentaires :
Laboratoire de physique de L’École normale supérieure (LPENS, ENS Paris/CNRS/Sorbonne Université/Université de Paris)


Auteur correspondant : Alexandros Alexakis
Contact communication : L’équipe de communication