Lorsqu’un émetteur est placé dans une microcavité, l’émission et l’absorption de photons deviennent des processus réversibles, et le système entre dans un nouveau régime connu sous le nom de couplage fort lumière-matière. Dans ce régime, deux nouvelles quasi-particules quantiques émergent, appelées polaritons, qui sont des mélanges entre les photons et les excitations électroniques. Récemment, le régime de couplage fort a été observé dans des dispositifs à semi-conducteurs tels les détecteurs unipolaires infrarouges. Une question ouverte fondamentale se pose pour ces systèmes : comment le transport électronique peut-il être efficacement couplé avec les polaritons inter-sous-bandes, qui sont intrinsèquement des états collectifs bosoniques ?

Dans l’approche bosonique, les excitations de la matière sont modélisées comme des oscillateurs harmoniques couplés. Bien que cette approche soit très efficace pour fournir les énergies des excitations collectives et les états couplés lumière-matière, elle perd la trace de la dynamique des populations électroniques, qui sont considérées comme des paramètres constants. De plus, les effets des interactions conduisent à une forte renormalisation des énergies des états couplés, qui deviennent alors très désaccordés par rapport aux niveaux électroniques à une particule qui véhiculent le courant électrique dans le dispositif.

Dans l’article Pisani et al. récemment publié dans Nature Communications, l’équipe QUAD du LPENS aborde ce problème par le biais d’investigations expérimentales et théoriques de détecteurs quantiques à semi-conducteurs où un niveau extracteur électronique est mis en résonance avec des états collectifs couplés lumière-matière. Ils développent une théorie quantique qui est libre de l’approche de bosonisation et prend explicitement en compte la nature fermionique des porteurs, ainsi que la dynamique des populations. Cette théorie, basée sur un système d’équations de Bloch non-linéaires, explique quantitativement les caractéristiques spectrales du photocourant (Figure). De plus, elle permet de comprendre comment les états électroniques collectifs produisent un courant fermionique dans les dispositifs quantiques. Ces développements permettraient de concevoir et optimiser des dispositifs optoélectroniques basés sur l’interaction cohérente entre les électrons et les photons.

Haut : schéma du photodétecteur quantique utilisé dans cette étude. Bas : spectres expérimentaux de photocourant (gauche) et spectres reproduits par notre modèle quantique (droite). Ec dénote l’énergie du mode de microcavité couplé avec le détecteur.

 

 

En savoir plus :
https://www.nature.com/articles/s41467-023-39594-z

Informations complémentaires :
Laboratoire de physique de L’École normale supérieure (LPENS, ENS Paris/CNRS/Sorbonne Université/Université de Paris)


Auteur correspondant : Yanko Todorov
Contact communication : L’équipe de communication